Mademoiselle Poulain de Nogent

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Mademoiselle Poulain de Nogent
Dénomination(s) Mlle Poulain de Nogent-sur-Seine; Mlle Poulain
Biographie
Date de naissance 1720?
Date de décès 1795?
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)
Dictionnaire Fortunée Briquet (1804)




Notice de Isabelle Tremblay, 2014

Née à Nogent-sur-Seine entre 1720 et 1730 et morte à Paris vers 1795, Mlle Poulain de Nogent est, biographiquement parlant, une parfaite inconnue. Seules ses œuvres permettent de reconstituer quelques éléments de sa vie et de son caractère : elle a pratiqué aussi bien la poésie que le roman, et férue d’histoire, elle a écrit sur le règne de Louis XIV et l’histoire de Port-Royal des Champs. Sensible aux défis que peut présenter la formation intellectuelle de la petite enfance, elle a posé un nouveau regard sur l’instruction des enfants qui, selon elle, devait s’appuyer sur une pédagogie du jeu. Deux préfaces nous donnent des indications précieuses : dans celle des Lettres de Mme la comtesse de la Rivière (1776), elle affirme que « la vérité des faits donne un droit de préférence sur les Romans » et elle défend l’authenticité de cette œuvre (un des rares romans épistolaires monophoniques dont le ressort principal repose sur l’amitié entre femmes). Cependant, faisant le point sur ses publications antérieures dans la préface des Poésies diverses (1787), elle confirme le statut fictionnel de ces Lettres de Mme la comtesse de la Rivière, qui nourrissent l’hésitation du lecteur quant à sa vérité, comme il est d’usage dans le roman épistolaire. Dans cette même préface des Poésies diverses, elle se dit « si persuadée du néant de la gloire de ce monde » qu’elle « ne désir[e] ni éloge, ni même une belle critique » (p. 230). Elle exprime aussi le contentement que lui procure l’écriture : « Je puis dire avec vérité que mes ouvrages sont à moi ; personne ne m’a aidée en rien : j’ai composé et rédigé tout moi-même. Il n’y a peut-être aucune femme, et peut-être aucun homme, qui puissent en dire autant» (p. 272).
Elle a connu une réception favorable dans les revues et journaux de son époque, notamment dans le Journal général de France (1787), dans L’Esprit des journaux français et étrangers (1787), dans le Journal littéraire de Nancy (1787) et dans le Journal encyclopédique ou universel (1787). Elle a échappé à la critique de Friedrich Grimm qui s’est pourtant prononcé négativement sur plusieurs auteures des Lumières dans sa Correspondance littéraire (1753-1790). On peut supposer qu’elle a connu une renommée importante étant donné que la notice sur sa ville d’origine, Nogent-sur-Seine, dans le Grand dictionnaire de géographie universelle ancienne et moderne de toutes les parties du monde (1863), porte la mention suivante : « Patrie de mademoiselle Poulain ». Les catalogues de bibliothèques privées révèlent que parmi l’élite qui formait son public, on comptait M. de Milly, un des commissaires nommés pour l'examen de la question sur l'abolition de l’esclavage, un professeur d’histoire, C. L. Van Bavière, mais aussi la reine de France Marie-Antoinette, dont la bibliothèque du petit Trianon abritait les Anecdotes intéressantes de l’amour conjugal et les Lettres de Mme la comtesse de la Rivière. Au siècle suivant, Sophie Frédérique Mathilde de Wurtemberg, princesse d'Orange puis reine des Pays-Bas, Jérôme Bignon, Arthur Dinaux, chevalier de la Légion d’honneur, la lisaient toujours. En revanche, cette femme de lettres est devenue étrangère à la critique récente, même si elle figure toujours dans les ouvrages bibliographiques. La notice qui lui est consacrée dans le Dictionnaire des femmes des Lumières pourrait néanmoins témoigner d’une attitude nouvelle envers son œuvre.

Oeuvres

  • 1768 : « Logogryphe », dans Mercure de France, Paris, p. 79-80.
  • 1768 : « Le printemps, stances », dans Mercure de France, Paris, p. 11-14 (poème reproduit dans Chefs-d’œuvre poétique des dames françaises depuis le treizième siècle jusqu’au dix-neuvième, Paris, Paulin, 1841, p. 235-237).
  • 1770 : Anecdotes intéressantes de l’amour conjugal, Paris et Londres, Hardouin & Gattey, 1786 et 1787.
  • 1776 : Lettres de Mme la comtesse de La Rivière à Mme la baronne de Neufpont, son amie, Paris, Froullé, 1777, 3 vol.
  • 1783 : Tableau de la parole ou nouvelle manière d’apprendre à lire aux enfants en jouant, Paris, Nyon l’Aîné.
  • 1786 : Nouvelle histoire abrégée de l'abbaye de Port-Royal, Paris, Varin, Froullé et Méquignon.
  • 1787 : Poésies diverses, Paris, Varin.

Choix bibliographique

  • Cioranescu, Alexandre, Bibliographie de la littérature française du dix-huitième siècle, Paris, Éditions du CNRS, 1969.
  • Frautschi, Richard, Angus Martin et Vivienne Mylne, Bibliographie du genre romanesque français, 1751-1800, Londres, Mansell, 1977.
  • Giraud, Yves et Anne-Marie Clin-Lalande, Nouvelle bibliographie du roman épistolaire en France: des origines à 1842, Fribourg, Éditions universitaires, [1977] 1995.
  • Goubier-Queffelec, Geneviève, «Mlle Poulain de Nogent», dans Valérie André et Huguette Krief (dir.), Dictionnaire des femmes des Lumières, Paris, Champion, à paraître.
  • Trévisi, Marion, «Les relations tantes, nièces dans les familles du nord de la France au XVIIIe siècle», dans Annales de démographie historique, 2006, n°2, p. 9-31.

Jugements

  • (À propos des Poésies diverses) : « Ces recueils de petites poésies de société font rarement une sensation un peu vive. L’à-propos est communément leur mérite principal, et l’à-propos a disparu lors de l’impression. Une chose qui caractérise cette collection, c’est qu’on y trouve des poésies en chant pour servir d’amusements aux dames religieuses : ce sont de saints cantiques, des compliments aux abbesses, aux supérieures et aux directeurs. On peut comparer ces recueils à des boutiques de quincaillerie où l’on trouve abondamment et à juste prix toutes les choses usuelles » (Journal encyclopédique ou universel, Paris, 1787, t. IV, partie III, p. 552).
  • (À propos des Lettres de Madame la comtesse de la Rivière) : « Elles sont encore écrites dans le style simple; et l’on n’en a dit généralement que du bien. Je n’en ai pas tiré vanité : j’ai pensé que je devais ces éloges à mon anonyme, ou plutôt à l’idée qu’on s’est formée que l’Auteur n’était plus de ce monde. On a senti qu’il serait inutile alors de donner des avis ou des coups de patte. » (Poésies diverses, Paris, Varin, 1787).
  • (À propos du Tableau de la parole) : « En général, nous pensons que cet ouvrage remplira le but que s’est proposé Mlle Poulain de Nogent, et qu’il peut faciliter et rendre plus agréables aux enfants les moyens d’apprendre à lire, moyens que des pédants routiniers leur font trouver tous les jours si ennuyeux et si rebutants » (Journal littéraire de Nancy, Nancy et Paris, M. Therrin, 1787, t. XXII, p. 270-273).
  • (À propos de la Nouvelle histoire abrégée de l’Abbaye de Port-Royal) : « On y trouvera tout à la fois de l’amusement, de l’édification, et une grandeur d’âme qui frappe et qui ravit » (Journal littéraire de Nancy, Nancy et Paris, M. Therrin, 1787, t. XXII, p. 270-273).
  • « Mlle P. de N. est encore l’Auteur des Lettres de madame La Comtesse de la Rivière, qui ont eu tant de vogue l’année dernière » (Journal littéraire de Nancy, Nancy et Paris, M. Therrin, 1787, t. XXII, p. 270-273).
  • (À propos de la Nouvelle histoire abrégée de l’abbaye de Port-Royal) : « L’auteur ne dit rien de trop ; le tableau qu’il présente intéresse vraiment les curieux, les âmes sensibles et celles qui veulent s’édifier » (L’Esprit des journaux français et étrangers, Paris, 1787, t. V, p. 43).
  • (À propos des Poésies diverses) : « Mlle Poulain de Nogent avait jusqu’ici gardé l’anonymat. En se déclarant l’Auteur des ouvrages dont on vient de lire le titre, elle annonce que celui-ci est son dernier. […] Pour servir Mlle Poulain de Nogent à son gré, nous ne devons donc rien dire de ses vers. » (Journal général de France, 15 mai 1787, p. 230).
  • « Littérateur née à Nogent-sur-Seine, vers 1730; morte à Paris, à la fin du XVIIIe siècle. Nous ne connaissons aucun détail sur sa vie; ses œuvres seules nous ont fait connaître son nom.» (Émile Socard, Biographie des personnages de Troyes et du département de l’Aube, Troyes, Léopold Lacroix, 1882, p. 364)
  • (À propos des Lettres de Madame la comtesse de la Rivière) : « Ce roman en lettres doit rentrer dans la catégorie des livres à clef, si l’on s’en rapporte à la note suivante extraite du catalogue Bazin : “Roman où l’on a fait entrer quelques noms et quelques faits du règne de Louis XIV, mais sans même se donner la peine d’essayer quelque chose comme un pastiche. Le nom même de l’héroïne, Mlle de Plounai, n’est que celui de l’auteur avec quelques lettres déplacées ; il est probable que celui de La Vanne ne vient [sic] guerre de plus loin” » (Fernand Drujon, Les livres à clef. Étude de bibliographie critique et analytique pour servir à l’histoire littéraire, Paris, Édouard Rouveyre, 1888, t. I, p. 542).
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